A. Ducasse au Brésil : » Un chef cuisinier a besoin de partager son expérience «
27 juin 2015
Catégorie : Actualité Chefs & Restaurant, Chefs, Presse & Médias, Tendances
RIO – Le chef Alain Ducasse porte une constellation de restaurant dans le monde entier, en France, aux États-Unis, au Japon, en Russie, au Qatar, en Italie, à Monaco, à Hong Kong et en Angleterre. Il est arrivé à Rio De Janeiro jeudi dernier pour remettre les diplômes à 250 jeunes étudiants en gastronomie à l’Université Estacio. De retour en France depuis samedi, il a quand même répondu à une interview exclusive pour le magazine en ligne Globo.
Traduction ….
Globe : Quelle est la vie d’un chef qui gère 24 restaurants dans huit pays différents, affichant 19 étoiles au guide Michelin ?
Alain Ducasse : Elle est simple, je cuisine. Bien sûr, je cuisine d’une manière spéciale. Je me suis une sorte de directeur artistique : je défini la ligne éditoriale de mes restaurants. Mes collaborateurs ont pleinement intégré ma vision de la nourriture et sont capables d’accomplir parfaitement les plats que j’imagine.
Votre visite au Brésil est organisée pour la cérémonie de remise des diplômes aux 250 étudiants en gastronomie à l’Université Estacio à Rio. Quelle est la signification pour vous ?
C’est un événement très important. Tout d’abord, pour les étudiants. Ils ont travaillé pendant deux ans et demi pour obtenir un diplôme en Gastronomie à l’Université Estacio. La remise des diplômes est une étape cruciale dans leurs carrières. La transmission et l’éducation l’est pour moi aussi : une de mes priorités c’est de transmettre mes connaissances. Un chef cuisinier a besoin de partager son expérience. Transmettre l’enseignement nous contraint à bouger, ça nous oblige à revoir ce que nous savons déjà. Partager les expériences est essentiel pour le progrès de la cuisine. C’est une activité à laquelle je consacre du temps.
Quels restaurants allez vous visiter à Rio ?
J’irais au restaurant « Irajá Gastrô « du chef Pedro de Artagão, et au restaurant » L’Etoile » du chef Emanuel Serrano. Je tiens également à visiter aussi la » Chocolate Q Factory » de la famille Achim.
Et l’école du Cordon Bleu à Botafogo, quelles sont vos projets ?
Nous sommes toujours à la phase d’échange d’idées avec notre partenaire. Il serait très prématuré d’en parler pour l’instant.
Avez-vous d’autres projets pour le Brésil ? Pensez-vous ouvrir un restaurant au Brésil ?
Nous sommes actuellement pleinement concentrés sur le partenariat avec l’Université Estacio. Mon souhait c’est que nous menions une collaboration tout à fait exemplaire. Nous mettons en place plusieurs initiatives telles que la création de nouveaux cours, par exemple. Nous avons aussi des projets pour ouvrir un restaurant au Brésil.
Depuis le début de votre carrière, la cuisine a connue une grande évolution dans le monde. Comment un chef doit se préparer à cette évolution ?
Il faut voir la cuisine dans sa globalité. Le cuisinier doit toujours être conscient de ce qui se passe autour de lui, et la curiosité est une qualité essentielle. Dans le même temps, le chef cuisinier doit être un bon gestionnaire. Un restaurant est une entreprise et doit prendre en compte autant la partie financière que l’aspect humain.
L’année dernière, vous avez décidé de créer un menu « durable » pour la réouverture du Plaza Athénée, la viande a perdu du terrain sur la carte. Quelle en est la raison?
Certes, pour la réouverture de mon restaurant au Plaza Athénée à Paris, je créé une carte qui fait appel au concept de « naturalité », donnant plus de place aux légumes, aux céréales et aux poissons de pêche durable. Ce fut une décision sur laquelle j’ai beaucoup réfléchi. Je crois que le cuisinier a un rôle important dans la lutte pour un régime alimentaire sain et préserver les ressources naturelles. Nous devons arrêter de manger autant de gras, de sel autant de sucre. Nous devons changer nos habitudes alimentaires, en particulier la consommation excessive de protéines animales. C’est un engagement fondamental et le cuisinier peut et doit contribuer à cette prise de conscience.
Comment voyez-vous la cuisine brésilienne d’aujourd’hui ?
Au cours des dernières années, le Brésil a fait un travail admirable. Le pays a l’avantage d’avoir une conjonction de trois facteurs :
- la une multiplication des talents, avec cette nouvelle génération de chefs qui a une solide expérience de la cuisine.
- la redécouverte des produits locaux et des techniques traditionnelles, elles sont l’élément vital du pays.
- le développement d’une clientèle d’amateurs éclairés.
La somme de ces trois éléments permettent de placer le Brésil en première place dans le scénario culinaire mondial.
Quel ingrédient vous séduit en particulier au Brésil ?
Beaucoup ! Les chefs de l’Université Estacio ont organisé une session de présentation de produits durant mon séjour à l’université. Ils avaient préparé des plats à base de palme, de manioc, d’aubergine, de banane et de fruits de l’Amazone et du Nord, comme le cupuaçu, Acai, le tamarin, le taperebá et le Murici. J’ai aussi goûté plusieurs variétés de café et quelques millésimes rares de chocolat.
Quels sont vos endroits préférés au Brésil ?
Comme toujours, et comme partout où je vais, je désire visiter les marchés.
Une fois la cuisine finie, quels sont vos plaisirs?
Pour moi, tout est toujours centré sur la cuisine. Je lis sur la cuisine, j’échange des idées avec des collaborateurs, et bien sûr, je cuisine à la maison, en famille ou entre amis.
Après Rio, quelle est votre prochaine destination ?
Peu importe où je vais : je serais dans une autre cuisine, alors je me sentirez à la maison.