Gérer sa communication lorsque qu’un chef étoilé est sur la sellette
07 fév 2015
Catégorie : Actualité Chefs & Restaurant, Chefs, Presse & Médias
Personne n’a pu passer à côté de la déferlante médiatique suite à l’article paru sur le site Francetvinfo concernant le harcèlement en cuisine du personnel dans un grand établissement Bordelais voué à attraper 3 étoiles au guide Michelin dans les prochaines années.
En quelques heures l’article paru en ligne ce 6 février à 7h du matin, a été repris par des dizaines de médias en France et dans le monde, les plus grands titres de la presse ayant relayé l’information à grande échelle. Comment un cas isolé peut il mettre en doute l’image d’un chef ?
Personne n’est à l’abri de ce genre de situation de crise médiatique
Outre l’importance du sujet, et le fait que tôt où tard les personnes impliquées devront s’exprimer, on peut se poser la question de savoir comment un grand chef de renommée mondiale, reconnu pour la qualité de son travail et par ses nombreuses étoiles doit réagir dans ce moments de grande tension, là où il est nécessaire de préserver son image ?
Dans l’histoire des grands chefs étoilés peu ont eu à faire face à ce genre de problème, aujourd’hui internet à changé la donne, une information qui aurait pu passer inaperçue il y a 20 ans, ne peut plus l’être aujourd’hui. La toile diffuse les informations à grande vitesse, lorsqu’une information est en ligne, il suffit de quelques heures pour qu’elle fasse le tour du monde.
Deux chefs ont déjà connu cette déferlante médiatique
Dans les dernières années quelques chefs ont dû faire face à ce genre d’évènements inattendus et pas du tout en ligne avec une stratégie d’image souvent construite grâce à des agences de communications, des conseillers en marketing ou des attachés de presse.
Les hommes politiques ont l’habitude de gérer des débordements de paroles, d’actes ou de chutes de popularités, les chefs de cuisine par contre ne sont pas du tout coaché pour faire face à cette problématique. Les Ministres, eux se rendent immédiatement sur place lorsqu’un problème survient dans n’importe quelle région de France, une façon de s’impliquer et de participer à l’évènement où du moins en prendre part.
Communiquer positivement et rompre avec le problème
Il faut donc aussitôt mettre en place un dispositif efficace de gestion et de communication en situation de crise, cela consiste à désamorcer la crise et de communiquer sur des informations positives. Pour cela plusieurs outils efficaces existent comme la conférence de presse, le communiqué de presse, il faut absolument éviter les déclarations susceptibles d’amplifier l’impact de l’évènement.
Faire face aussitôt
Le chef Londonien Eston Blumenthal du Fat Duck a dû faire face par deux fois à deux intoxications alimentaires ( 2009 et 2014 ) qui ont conduit la première fois plus de 400 personnes intoxiquées, une déferlante médiatique avait aussi à ce moment là incriminé le chef et ses établissements.
Le chef n’hésita pas à monter au créneau médiatiquement et à répondre aux accusations concernant ses techniques de cuisine moléculaires lors d’un conférence de presse. Le restaurant 3 étoiles fut fermé durant 15 jours, il redémarra aussitôt en affichant complet.
L’épilogue. Il a été fourni lors d’une conférence de presse tenue par Chef Heston Blumenthal. Ce dernier a expliqué au monde que la cuisine moléculaire, injustement incriminée, pouvait clairement être innocentée. Le coupable venait d’être identifié : il s’agissait, tout simplement, d’un norovirus retrouvé chez six membres de son personnel et chez plusieurs de ses clients intoxiqués. Chef Heston Blumenthal a affirmé être totalement étranger à la redoutable catégorie des «empoisonneurs alimentaires».
Réaction tardive mais intense campagne de communication par la suite
Le chef Danois René Redzepi a connu les mêmes mésaventures à son restaurant Noma à Copenhague. Le chef classé Meilleurs Restaurant du Monde durant plusieurs années à dû faire face à l’intoxication d’une soixantaine de personne sur deux jours. Aussitôt la presse internationale s’en est fait l’échos, la renommé du chef, son classement numéro 1 du monde, sa sur-médiatisation, ont fait de lui une cible privilégiée.
L’épilogue : La direction du restaurant Noma avoue lors d’un méa-culpa avoir réagi trop tardivement pour désinfecter ses cuisines en raison d’un problème de communication au sein de ses équipes. Des clients mécontents avaient en effet signalé par mail leur maladie quelques jours avant. «Noma a reçu le premier message en danois. Ce mail a été reçu par un salarié ne parlant pas danois, qui l’a transmis au manager du restaurant le vendredi 15 février. Or celui-ci, après son service, est parti en week-end sans regarder sa messagerie.» Autrement dit, l’épidémie aurait pu être contenue rapidement si la boîte mail avait été consultée. Le directeur de l’établissement ne s’est toujours pas remis de ce couac interne aux conséquences malheureuses. «C’est la pire chose qui pouvait nous arriver, nous sommes profondément désolés», avait déclaré Peter Kreiner. «J’ai personnellement discuté d’un dédommagement avec tous les clients qui ont été affectés», a ajouté le directeur du restaurant. Ces derniers se sont vus offert deux possibilités: soit un nouveau dîner, soit un remboursement.
Le chef enchaînera ensuite avec toute une période de reconquête de sa popularité à travers les médias, puis de grands travaux ont été réalisés dans ses cuisines, avec une large diffusion sur les réseaux sociaux et le web. Le chef perdra sa première place au classement mondial en 2013, mais retrouvera la première place l’année suivante. Une communication rondement menée.
S’exprimer et agir
Alors même si le sujet est différent, pour la Grande Maison à Bordeaux, le chef qui signe la cuisine de l’établissement, même si il n’est pas présent sur place en cuisine, doit faire face au problème puisque c’est son nom qui est cité constamment. La situation est d’autant plus importante que l’actualité et la population sont actuellement très sensibles à ces sujets de harcèlements.
La rigueur de travail et de qualité dans les établissements 3 étoiles sont bien connus dans l’univers de la restauration et même légendaires, mais il semblerait que dans ce cas là, le chef en place à Bordeaux ait dépassé les critères de rigueurs imposés pour obtenir de la qualité dans les grandes tables étoilées françaises.
Alors pour l’instant La Grande Maison, n’a pas réagis directement, mais elle ne pourra pas rester longtemps sans s’exprimer, où appliquer un acte fort pour montrer sa détermination à ce que ces pratiques ne se renouvellent pas. Alors le chef sur place sera t’il le maillon qui va sauter ? … c’est en tout cas ce qui se murmure dans la profession.