Anne-Sophie Pic : La chef la plus médiatique de cette fin d’année
22 déc 2014
Catégorie : Actualité Chefs & Restaurant, Chefs, Presse & Médias
On la voit un peu partout dans les médias, elle occupe la scène médiatique de cette fin d’année, la chef Anne-Sophie Pic est omniprésente actuellement sur les médias grands publics.
Depuis l’annonce de la future ouverture de son prochain restaurant à New York, depuis le prix du » Rayonnement gastronomique « , depuis son titre de 3 étoiles au Michelin, depuis son élection de la chef Femme de l’Année par le » 50 Best restaurants » San Pellegrino, depuis son titre de Femme de l’année par le quotidien économique La Tribune, depuis sa collaboration avec Air France, la chef n’en finit pas d’occuper le terrain médiatique.
Elle était ce soir sur le plateau de Canal + au Grand Journal aux côtés de la journaliste Elise Lucet, face à Antoine De Caunes et Natacha Polony.
Vous pourrez d’ailleurs découvrir son Pithivier de gibier sur le plateau de Canal+ …
Point commun entre toutes les invitées » Elles cartonnent dans un monde de mec » …
A la question quelles sont les trois figures qui ont marqué 2014, elle a répondu : Omar Sy ( L’acteur pour son parcours ), le chef Thomas Keller ( on ne saura pas pourquoi ? ), Mego Terzian Président de Médecin sans Frontière ( pour son action, notamment au moment de l’apparition du virus Ébola ).
La chef qui continue son parcours sans faute, étonne par sa capacité à assumer tant de développement et d’activités, elle nous indique ci-dessous que » la cuisine est devenue une affaire de politique « …
Suivez … L’Humanité … suivez son interview par Paule Masson – Photo Michael Roulier
Anne-Sophie Pic : « Aujourd’hui avec la crise, les gens se sont remis à cuisiner »
Seule chef femme à bénéficier des trois étoiles au Guide Michelin, elle tient comme à la prunelle de ses yeux à ne pas s’écarter de l’essentiel : porter haut les valeurs d’humanité que génère la cuisine. Anne-Sophie Pic : « Aujourd’hui avec la crise, les gens se sont remis à cuisiner »
La cuisine française a longtemps dominé la gastronomie mondiale. Mais dans le dernier classement des 50 meilleurs restaurants du monde, publié l’été dernier, pas un Français ne figure dans le top 10. La tradition gastronomique française est-elle en perte de vitesse ?
Anne-Sophie Pic Il s’agit d’un classement très anglo-saxon. Il a le mérite d’exister mais nous n’évoluons pas dans le même système. Je ne crois pas du tout que la cuisine française soit en perte de vitesse. Elle est au contraire très active et se réinvente quotidiennement. Elle reste une référence, ne serait-ce que par la qualité de ses techniques. Si elle n’exerce plus la même suprématie qu’hier, c’est parce que, aujourd’hui, on cuisine très bien dans le monde entier. Des pays sans culture gastronomique sont en train d’inventer une cuisine. Il s’agit d’une très bonne nouvelle. Pourquoi faudrait-il chercher à opposer les pays entre eux ? Cela ne me semble pas très judicieux. La cuisine est devenue une affaire politique. Elle est trop souvent utilisée pour mettre un pays en valeur par rapport à un autre. Dans ce jeu, les Anglo-Saxons essaient de dominer. Ils sont engagés dans une lutte de pouvoir qui ne me semble pas positive parce qu’elle pousse à s’écarter de l’essentiel. La cuisine véhicule beaucoup de valeurs. Elle donne du plaisir, invite à la convivialité, facilite le partage, nous met au défi d’innover, porte haut l’hospitalité, génère de la proximité avec les gens, les clients.
Avec la mondialisation, la porosité entre les cultures s’est beaucoup développée. Comment a-t-elle enrichi la cuisine ?
Anne-Sophie Pic L’ouverture des cuisines les unes aux autres est nécessaire. Elle permet d’évoluer, de s’enrichir. La différence des cultures crée une richesse dans la gastronomie mondiale. Il faut la préserver. Elle nous nourrit. Mais je ne parle pas d’internationalisation de la cuisine. J’adore utiliser les ingrédients japonais, pour autant je n’ai pas la sensation de faire une cuisine japonaise.
Craignez-vous une certaine uniformisation de paysage ?
Anne-Sophie Pic Il faut se méfier de tout effet de mode. Quand la cuisine moléculaire est arrivée, on ne parlait que d’elle. Les tendances existent, elles sont utiles, nécessaires. Mais elles sont éphémères. Je ne vois pas pourquoi une pensée qui semble être nouvelle ou contemporaine deviendrait tout à coup la vérité.
En France, la culture culinaire fait partie du patrimoine national. Pourtant, dans les familles, on cuisine moins, les plats tout préparés ont envahi le quotidien. Vous avez créé une fondation, Donnons du goût à l’enfance. Est-ce important d’apprendre à cuisiner ?
Anne-Sophie Pic La culture du goût fait partie de mon histoire. À la maison, on ne mangeait pas seulement pour se nourrir, on y prenait du plaisir. À chaque fois que je donne des cours aux enfants, j’observe de petits miracles. À la maison, quand mon fils se met aux fourneaux, il le vit comme une récréation. Je ne suis d’ailleurs pas sûre que la perte de savoir-faire dans les familles soit si manifeste. Avec la crise, les gens se sont remis à cuisiner. Elle est une valeur refuge quand tout va mal, quand le besoin se fait sentir de profiter de plaisirs simples, de se retrouver en famille. Nous assistons à un retour d’une culture culinaire qui dépasse de loin le fait de simplement bien manger.
Vous avez ouvert une « cantine » dans le centre de Valence qui reprend le concept de restauration rapide, version gastronomique. Est-ce une manière de dire l’importance que la cuisine reste accessible, populaire ?
Anne-Sophie Pic Oui. La cantine évoque une façon de se nourrir plus spontanée et peu chère. Les prix dans un restaurant trois étoiles sont inaccessibles au plus grand nombre. Mais les grands cuisiniers doivent garder un côté populaire, effectivement, en sachant proposer des plats goûteux, simples, bon marché, composés de produits frais. On ne peut pas rester enfermé dans sa tour d’ivoire. Ma grande hantise, c’est d’être considérée comme quelqu’un d’inaccessible. J’ai reçu beaucoup de prix cette année, mais je suis l’antistar même. La vérité n’est pas ce système de vedettariat. Elle est ici, dans mon restaurant, mon terroir, dans le partage des émotions au quotidien, dans la sincérité.
Vous venez d’une famille qui a connu trois générations de chefs étoilés. Vous avez décroché vous-même ces étoiles en 2007 et êtes la seule femme en France à avoir cette distinction. Est-ce une forme de pression ou de délivrance ?
Anne-Sophie Pic Un peu des deux. J’assume la pression. Il fallait que les trois étoiles reviennent à la maison. C’était un devoir de mémoire vis-à-vis de ma famille. J’ai lutté pour les obtenir et ce fut aussi une délivrance de les avoir, un nouveau départ pour ma cuisine. Elles m’ont donné envie d’être plus innovante, plus audacieuse, d’être digne de cette nouvelle responsabilité.