» Faire du local ne coûte pas beaucoup plus cher « 

13 juin 2013
Catégorie : Chefs, Presse & Médias, Produits Saison marché

Suite du premier article paru sur le blog Pourcel ce dimanche 9 juin, qui sur le site Huffingtonpost avait lancé un grand papier sur  le thème  » Panique dans l’assiette, qui sont les fournisseurs des restaurants ?  » …. Continuons à explorer l’univers décrit par le journaliste Stanislas Kraland qui depuis a fait couler beaucoup d’encre.

« Faire du local ne coûte pas beaucoup plus cher »

Au restaurant Les Grès dans le petit village de Lindry en Bourgogne, on n’a pas ce problème. Dans une ancienne épicerie, Jérôme Bigot « n’envoie que du bon et du minute à ses premiers clients« , vins de Bourgogne à l’appui, mais pas seulement. Son second, Teddy Perez assure à ses côtés l’apprivosionnement essentiellement auprès de fournisseurs locaux. Les fruits et légumes proviennent pour partie de chez le maraîcher Frédéric Lamour, la viande d’un boucher de Sens qui livre en direct, les épices viennent quant à elle de dijon… Cerise sur le gâteau Jérôme Bigot et Teddy Perez s’adonnent quotidiennement à la cueillette sauvage.

« Faire du local ne nous coûte pas beaucoup plus cher, » explique-t-il. Pour les fruits et légumes, la différence est marginale, voire inexistante. Restent donc les viandes et les poissons où la qualité se paye. Des filières réservées à une élite? « Presque tous nos fournisseurs travaillent aussi avec des particuliers, » précise-t-il. Est-ce à dire que les restaurateurs ne mettent jamais les pieds chez les grands distributeurs, à l’image de Métro ? « On y va pour les sopalin et les sacs poubelles, » plaisante Teddy Perez. Reste que le spectacle que le lieu leur propose est moins amusant. « Quand on regarde les caddies de nos collègues, ça fait peur, » nuance-t-il.

Alors que le restaurant s’apprête à mettre en avant les restaurants locaux grâce à une carte et un cahier des producteurs dans l’entrée de l’établissement, rares sont leurs confrères prêts à les imiter. Pourtant, « les gens demandent d’où viennent les produits, on sent monter une véritable curiosité, » affirme Teddy Perez.

Un trois étoiles chez Métro

Se refiler les bonnes adresses, plus qu’une passion c’est aussi une nécessité pour certains chefs. « Aujourd’hui on assiste à l’émergence de toute une nouvelle génération de cuisiniers pour lesquels c’est avant tout le produit qui prime, » explique Nicolas Gautier, chef au Chateau d’Esclimont, à Saint Symphorien le Château près de Paris.

Mais pour dénicher ces bons produits, encore faut-il que producteurs et éleveurs parviennent à trouver des débouchés. C’est là qu’intervient Baladovore, une application que Nicolas Gautier s’apprête à lancer à la fin du mois. Son principe est simple: d’un côté les chefs y inscrivent leurs adresses, de l’autre les utilisateurs qu’ils soient professionnels ou non peuvent se géolocaliser grâce à leur smartphone et trouver de bons producteurs près de chez eux. L’objectif ? Maintenir et renforcer le maillage territorial de ces bons producteurs pour doper ce qui ferait presque figure de marché parallèle.

Se fournir localement, tous voudraient pouvoir le faire mais si la géographie s’étudie, elle est néanmoins immuable. À l’Auberge du vieux puits de Fontjoncouse (Aude), trois étoiles au Guide Michelin, le chef Gilles Goujon l’affirme sans honte, et même avec une certaine fierté : « Je me fournis chez Métro ». Un trois étoiles chez un grossiste synonyme de plats préparés? À première vue l’alliance étonne, mais pour Gilles Goujon, l’union relève davantage du mariage de raison que du mariage forcé.

Il faut dire que dans l’Aude point de homards, de langoustines, de rougets ou de canard de l’huppe, pas davantage de produits bretons, pour tout cela, le chef triplement étoilé a besoin de l’enseigne auprès de laquelle il intervient également pour former le personnel. Malgré une mauvaise image, Métro s’est acquis la clientèle de certains grands chefs, proposant une gamme de produits prémiums tout en faisant preuve de souplesse dans l’approvisionnement grâce à un véritable travail de référencement des petits producteurs.

Pour ses viandes, Gilles Goujon s’approvisionne auprès de quelques éleveurs locaux triés sur le volet dont il conserve jalousement les adresses, mais pour ses fruits et légumes, c’est aussi dans sa région qu’il se fournit, à l’image du marché de Lusignan où l’on guette ses moindres faits et gestes, ou encore les Halles de Narbonne, tout aussi ouvertes au grand public.

Pouvoir faire ses courses au même endroit qu’un chef triplement étoilé n’a rien d’un fantasme, c’est une réalité. Faire ses courses au marché, les chefs n’ont que ces mots à la bouche, comme une évidence trop souvent oubliée.

http://www.huffingtonpost.fr/2013/06/09/fournisseurs-vrais-restaurants_n_3403745.html?utm_hp_ref=france

 

Stanislas Kraland

Mots clés: ,

Laisser un commentaire