Les déchus du Macaron – acte II -
02 juil 2011
Catégorie : Chefs, Presse & Médias
Les déchus du Macaron – suite -
Quand Alain Senderens rend ses trois étoiles au guide rouge de Michelin, en 2006, c’est un coup de tonnerre pour toute la profession. Le chef du Lucas Carton est en effet la figure de proue de la « nouvelle cuisine ». Depuis, à la même adresse, sur la très chic place de la Madeleine, son restaurant, deux étoiles au Michelin, surprend toujours avec des additions divisées par quatre.
Pourquoi avoir joué quitte ou double ?
Il m’a fallu une bonne année pour prendre ma décision. Mes doutes ont commencé un soir d’automne. Sur la carte, de la truffe noire, du caviar, du gibier… Je vais machinalement à la caisse et je passe en revue les additions : 400 euros, 380 euros, 550 eu-ros, 700 euros. Impossible de continuer ainsi. Ma clientèle était constituée d’étrangers à 80 %, donc de gens de passage. Une dépendance dangereuse. Je convoque mon comptable dès le lendemain et je lui demande de calculer le coût de l’assiette sans le tralala, les fleurs, les nappes, et en divisant le personnel par deux. J’ai également rassemblé mes fournisseurs en leur demandant de baisser leurs prix, mais en augmentant les quantités, puisque je passais de 80 à 200 couverts par jour. 80 % d’entre deux m’ont suivi. L’objectif était de continuer à garantir les trois étoiles dans l’assiette, mais à moindres frais. Aujourd’hui, ma clientèle est française à 80 %, je suis moins stressé et je n’ai plus d’ego dévorant. Ou alors beaucoup moins !
Pourquoi n’avez-vous pas ouvert un second restaurant ailleurs, histoire d’équilibrer les risques ?
Je n’en avais pas envie. Mais, aujourd’hui, j’y songe. Pour mes petits [cuisiniers], j’ouvrirais bien un bistrot. Et puis j’ai des projets à New York. Chut, il est trop tôt pour en parler…
Cinq ans après, vous regrettez votre décision ?
Pas du tout. C’est la plus belle chose qui me soit arrivée.