Yamamoto… Yi va même à vélo…
25 mar 2008
Catégorie : Actu Pourcel étranger
C’est mon coup de cœur de ce début d’année, ma table préférée depuis bien des mois. Le chef s’appelle Seiiji Yamamoto. Il est Japonais comme on peut le comprendre et si on essaye de prononcer son nom. Il a obtenu deux étoiles au premier guide Michelin 2008 couvrant la ville de Tokyo. Il faut courir découvrir ce jeune chef plein de talents. Son restaurant porte le nom de « RuyGin », qui veut dire le dragon. Un dragon qui vous enflammera dès la première bouchée, tout en subtilité, vous allez découvrir une cuisine japonaise d’inspiration traditionnelle qui sous la patte de ce jeune chef, vous réconciliera avec les sashimis, la miso soupe, le tofu, le riz gluant ou la pâte de haricots rouges.
Nous quittons le quartier de Marubiru où se trouve notre restaurant pour rejoindre le quartier populaire de Roppongi, un quartier très vivant le soir et une grosse partie de la nuit. Munissez-vous précieusement de l’adresse du restaurant et du numéro de téléphone, car même les taxis ne connaissent pas. À l’arrivée, vous entrez dans une rue minuscule, et tout au bout grâce au numéro de maison, vous découvrez une porte dérobée, poussez-la, vous entrez dans un tout petit couloir orné de photos de plats très design. Un élément rassurant, vous êtes au bon endroit. À l’intérieur, la salle de restaurant est sobre, rien de bien attrayant, murs clairs, boiseries et claustras en bambous, tout au plus 25 places assises. Vous êtres vraiment dans un restaurant japonais, zen, dépouillé, les baguettes sont déjà sur table, ainsi que les branches de cerisiers fleuries, et oui le printemps arrive, c’est très symbolique pour les Japonais.
Le jeune chef plein d’entrain vient vous saluer, il est adorable, il fait très bon enfant, un peu enrobé pour un Japonais… il ne parle pas un mot de français, ni d’anglais d’ailleurs, il est un fan de Adria, Andoni, ou Berasategui. Il fréquente d’ailleurs tous les ans le festival de cuisine de San Sébastian, d’abord comme spectateur il y a quelques années, jusqu’à sa première démonstration de cuisine en 2007. Présent aussi en 2008 au festival Omnivore, il avait impressionné l’assemblée.
Le décor est planté, il suffit de passer à table. Et là, le festival commence, c’est une bonne douzaine de plats qui se succèdent. Des saveurs exceptionnelles, un tartare de calamar au caviar, un sashimi de ventre de thon unique, un homard cru accompagné d’une poudre de gingembre, une gelée de yusu, un bouillon de thon séché, une poutargue de cabillaud meilleure qu’à Marseille, une crème de tofu aux asperges du pays, une daurade marinée aux branches de cèleri et pétales de fleurs de cerisier, à chaque plat vous êtes interpellés par de nouvelles saveurs. Au fil du repas, plusieurs thés vous sont servis, des thés verts bien sûr, tous aussi particuliers les uns que les autres, il vous permettent de vous épurer la bouche avant de continuer sur le prochain plat. Arrive ensuite le clou de la soirée, un dessert indescriptible, une pomme glacée en poudre dans une coque de sucre, c’est unique, magique. C’est le dessert qui vous fait tout oublier et vous mène vers une jouissance gastronomique.
Seiiji utilise des techniques simples et complexes à la fois, sa cuisine est un pied de nez à la cuisine moléculaire, il retravaille le traditionnel, l’habille de modernité, s’en amuse. Il ne cherche pas à faire du sensationnel, mais plutôt du léger et de l’impertinent, car il est vraiment impertinent de toucher à la cuisine traditionnelle japonaise, c’est osé, il l’a fait. On sent qu’il s’amuse, il sérigraphie ses assiettes, il sert ses plats sur des plaques de verres, il ré-interprète une boîte de sardines en verre qu’il vous sert avec l’ouvre-boîte, il râpe même de la truffe sur une spécialité japonaise, il chamboule les repères et on s’amuse autant que lui. C’est intelligent, pensé et complètement décalé… Courez-y… enfin prenez l’avion…